mercredi 29 avril 2020

CINQUIÈME PARTIE DU LIVRE : UN CHEMIN VERS L'ESPRIT


VIE                   SENSIBILITÉ      -       CONSCIENCE
Éthérique                        astral                                    spirituel

Il est temps de franchir une seconde étape sur le chemin que nous suivons. Mais nous donnerons tout d'abord quelques indications sur l'enseignement de la science spirituelle.

Après le monde éthérique, c'est le monde astral que nous devons maintenant étudier. Or, ce monde présente un caractère extrêmement complexe dans ses manifestations.

Partir de faits caractéristiques d'un des aspects de l'astral, et, pour chacun d'eux, en chercher l'explication, donnerait au lecteur l'impression d'être conduit à l'aventure au travers d'observations arbitrairement choisies. Pour la clarté de l'exposé, partons de notions générales déjà classées et ordonnées, et indiquons aussitôt les faits qui viennent confirmer nos affirmations. C'est donc uniquement par un artifice d'exposé, et non par infidélité à la règle que nous avons adoptée, que nous donnerons la doctrine d'abord, ensuite les faits qui viennent l'appuyer.

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LES FORCES QUI ARRÊTENT LA CROISSANCE

Les observations que nous avons faites sur la croissance des plantes, les méditations qui les ont complétées et développées, nous ont ouvert le domaine de la vie : le monde éthérique.

Mais dans son livre L'Initiation, Rudolf Steiner, après nous avoir proposé la méditation sur la graine et le développement des végétaux, nous en propose une autre sur leur flétrissement et leur mort. La première méditation nous a conduits de la graine au plein épanouissement. 

Dans la seconde, Rudolf Steiner nous demande de nous représenter la plante à ce point de suprême développement, puis de suivre par la pensée les étapes de son déclin jusqu'à sa disparition. Pourquoi cette dualité, cette sorte d'opposition entre les deux méditations, alors que le cycle de la vie végétale va, semble-t-il, depuis la graine jusqu'à la mort ?

Parce qu'en continuant nos observations sur la vie végétale au-delà du moment où la plante cesse de croître, où son corps éthérique a entièrement développé son plan de construction, nous sommes amenés jusqu'au seuil d'un nouveau domaine, entièrement différent du monde éthérique, et que la science spirituelle désigne sous le nom de monde astral.  L'éthérique permet de comprendre comment le végétal vit et se développe. Il n'explique pas sa mort. La connaissance de l'astral sera la deuxième étape sur le chemin qui nous mène vers l'esprit.

La plante ne possède, outre son corps physique, qu'un corps éthérique. Les animaux et l'homme possèdent également un corps éthérique ·qui assure en eux la vie végétative. Mais ils possèdent en outre la faculté de se mouvoir et la sensibilité, avec toutes leurs conséquences, notamment l'attraction ou la répulsion, le désir ou la crainte, etc. L'ensemble de ces facultés, étrangères à la vie végétale, mais qui apparaissent chez les animaux, sont la manifestation des forces que la science spirituelle appelle forces astrales.

La plante ne possède pas ces facultés. Mais cela ne signifie pas que le monde astral lui reste entièrement étranger ; le fait qu'elle dépérit et meurt est la preuve de son action. Un être qui serait soumis uniquement aux forces éthériques et échapperait entièrement aux forces astrales continuerait inlassablement de croître, de développer sans cesse des formes toujours identiques, se surajoutant indéfiniment les unes aux autres. Il serait le foyer d'une vie pullulante, monstrueuse, sans dépérissement, sans mort.  Ce sont les forces astrales qui limitent le développement, arrêtent la croissance, entraînent la mort. Tel est l'enseignement de la science spirituelle.

Examinons ce premier aspect des forces astrales, en prenant pour point de départ l'observation du dépérissement des plantes. Voyons si, nos observations vont confirmer les indications qui viennent d'être données.

La plupart des plantes, toutes celles que les botanistes dénomment phanérogames, fleurissent, et la fleur se transforme en fruit. La floraison et la fructification entraînent dans la plante des modifications importantes, de véritables métamorphoses. Pour en comprendre toute l'importance, il ne faut pas s'arrêter aux changements de structure et de forme qui apparaissent immédiatement, dès le premier regard. Si frappants qu'ils puissent paraître, ils n'apportent pas de modifications essentielles à la vie végétale. 

Dans leur structure anatomique, la fleur et le fruit ne sont pas autre chose que la métamorphose d'un bouquet de feuilles. Les forces éthériques permettraient de l'expliquer. Mais avec la floraison se manifestent encore d'autres caractères qui étaient jusqu'alors étrangers à la vie végétale. 

Certains de ces caractères sont très évidents. Beaucoup de fleurs sont douées d'une certaine capacité de mouvement; elles s'ouvrent pendant le jour et se ferment pendant la nuit. Elles sont dotées de sexualité : beaucoup de plantes portent des fleurs mâles et des fleurs femelles, parfois réparties sur des sujets différents. 

Toutes ont des organes mâles et femelles. Elles ont une couleur, souvent une odeur qui n'existent pas dans la plante. D'autres caractères se révèlent moins immédiatement à l'observation. Dans la fleur et le fruit apparaissent des substances aromatiques, des glucoses, de l'amidon, etc., que la plante ne contenait pas ou qu'elle ne possédait qu'en moindres proportions. Enfin certains botanistes, notamment l'Hindou Bose, ont découvert qu'au moment où la fleur est fécondée il se produit une véritable élévation de température chez la plante.

Ces caractères différents de ceux que présente normalement la vie végétale, ont amené quelques botanistes à considérer la floraison comme une sorte de maladie de la plante. C'est une maladie souvent mortelle, puisque beaucoup de plantes annuelles se flétrissent et meurent aussitôt après la fructification ; presque toutes cessent de croître dès ce moment.

Si nous rapprochons tous ces caractères nouveaux qui apparaissent avec la floraison, et qui, jusqu'alors, étaient étrangers à la vie végétale, nous sommes amenés à reconnaître qu'ils apportent à la fleur quelques facultés qui ne sont complètement développées que dans le règne animal. Il en est ainsi du mouvement, de la sexualité, de la chaleur. Les substances qui apparaissent dans la plante au moment de la floraison et surtout dans le fruit sont celles qui sont les plus nourrissantes pour les animaux et pour l'homme. 

On fait les foins au moment où les herbes fleurissent ; beaucoup d'animaux et l'homme même tirent leurs aliments surtout de fleurs, de graines et de fruits. Il semble donc qu'au moment où les forces de croissance des plantes se métamorphosent en floraison et fructification, des éléments nouveaux s'introduisent dans la vie végétale et l'apparentent à la vie animale. Le règne végétal tend pendant un moment à se hausser vers le règne qui lui est supérieur  ; il en reçoit certains caractères.  

En retour, et par une sorte d'offrande, le végétal apporte aux règnes supérieurs des éléments élaborés au moyen des forces astrales qu'il a reçues. Les règnes supérieurs vont de leur côté entretenir leur vie, donc leur corps éthérique, grâce aux substances que l'astralité a fait apparaître chez les plantes. Il se produit ainsi une sorte de don réciproque entre les règnes, un échange entre l'astral et l'éthérique.

La reproduction par fleurs et graines est d'autant plus extraordinaire que beaucoup de plantes possèdent d'autres moyens pour se reproduire, des rejets, racines traçantes, tubercules, cayeux d'oignons, etc. Enfin presque toutes les plantes peuvent être propagées par boutures. Ces modes de reproduction sont prorres au règne végétal, tandis que la graine est souvent très analogue aux œufs de certains animaux inférieurs. 

La fleur et la graine correspondent donc à une astralisation de la plante. Les autres modes de propagation, purement végétaux, manifestent1a tendance de l'éthérique à la prolifération, au pullulement. Gœthe avait déjà remarqué cette opposition entre les deux modes de reproduction des végétaux. Il considérait le mode de reproduction par fleurs et graines comme anormal et surajouté. Il l'appelait le péché originel de la plante, parce qu'il entraîne souvent sa mort, toujours l'arrêt de sa croissance, et qu'il semble indûment emprunté à la sexualité animale.

Les forces astrales qui font irruption dans la plante au moment où elle fleurit ne la pénètrent que pendant un moment, tandis qu'elles se développent pleinement chez l'animal et chez l'homme. La tendance des forces astrales à détruire ou tout au moins à limiter, à contenir les forces éthériques, se manifeste de façon frappante chez les végétaux. Il était donc important de la relever chez eux tout d'abord.

En observant une plante en fleur, nous nous trouvons devant un cas limite : le passage, la transition entre le monde éthérique et le monde astral[1]. De tels cas limites sont toujours importants à observer. 

Nous pouvons en tirer deux enseignements. Ils nous permettent tout d'abord de mieux préciser les caractères distinctifs des deux ordres de phénomènes, ceux qui dépendent de l'éthérique et ceux qui se rattachent à l'astral. En étudiant la plante, nous pouvons en tirer un autre bénéfice. 

S'il est nécessaire, en effet, d'apprendre à distinguer très nettement l'éthérique de l'astral, il est non moins important de bien voir que ces deux mondes ne sont pas séparés par des cloisons étanches, mais qu'ils se mêlent étroitement, s'amalgamant dans ce que nous appelons la vie de la nature. 

En nous, et autour de nous, ce que nous dénommons vie organique est formé en réalité par l'activité des forces éthériques et des forces astrales agissant réciproquement l'une sur l'autre. Ces rapports apparaissent sous un jour contradictoire.  Ils sont à la fois coopération et lutte : lutte continuelle entre des forces d'édification, les forces éthériques, et des forces de destruction, les forces astrales.


DIVINITÉS QUI TUENT,
DIVINITÉS QUI FÉCONDENT

Les peuples anciens avaient fort bien vu ce fait. Beaucoup de mythologies anciennes l'ont symbolisé par des divinités destructrices qui sont en même temps des dieux de la fécondité, ou que les mythes associent à des dieux fécondants.

Le type le plus connu de ces divinités est le Shiva hindou qu'on représente dansant sur le cadavre d'un lion, dieu de la destruction, archer divin qui apporte la mort et en même temps dieu de la procréation qu'on adore sous le symbole du phallus. Son caractère est encore renforcé chez sa parèdre, son double féminin, sa Sakti, Kali-Dourga, qui s'enorgueillit de porter sur les épaules en guise de joyaux un collier de crânes. En son honneur, certaines sectes accomplissaient des sacrifices humains ou des suicides rituels,  tandis qu'à d'autres moments la même déesse présidait à des prostitutions sacrées ou à des hiérogamies.

Chez les Grecs, Hadès, le dieu des morts, est uni à Proserpine, la déesse de la végétation. Dans presque toutes les mythologies on trouve des dieux du monde souterrain, des dieux chthoniens qui sont en même temps dieux des morts et dieux de la fécondité surtout végétale. Artémis porte en elle-même ce double caractère. Elle fait mourir, c'est elle qui arrache l'âme du corps des mourants, tandis que par ailleurs elle préside aux accouchements ; c'est elle qui délivre les femmes enceintes. L'Artémis d' Asie Mineure est aussi déesse de l'allaitement. À Éphèse et à Milet, on la représentait portant sur la poitrine trois ou quatre rangées de seins.

Le double mode de représentation symbolique des rapports de l'éthérique et de l'astral, tantôt par un couple de divinités antagonistes (selon le type Hadès-Proserpine), tantôt par un seul personnage divin, qui détruit d'une main ce qu'il édifie de l'autre (comme Artémis ou Dourga), n'est pas purement arbitraire. Il correspond à une réalité dont l'observation de la plante, rapprochée de celle de l'animal, nous donne la clef.

Dans le règne végétal, les forces astrales agissent de l'extérieur sur le corps éthérique de la plante qui est seul lié au corps physique. Il y a donc antagonisme entre deux éléments étrangers l'un à l'autre, qui luttent l'un de l'intérieur, l'autre de l'extérieur de l'organisme. 

Cette lutte constitue cependant, et en même temps, une coopération, puisque la plante telle qu'elle existe, telle que nous la voyons, en est le résultat. Lorsque les créateurs de mythes observaient les rapports de l'éthérique et de l'astral dans la vie végétale, ils la symbolisaient donc, à juste raison, par deux êtres distincts opposés de nature, mais unis cependant par quelque lien subtil. Ainsi naquit dans l'imagination des Anciens, des couples du type Hadès-Proserpine.

Chez l'animal, par contre, le corps astral est incarné, lié aux corps éthérique et physique. Dans chaque organisme, l'éthérique et l'astral s'opposent et s'étreignent en un combat incessant, où l'astral ronge et dévore l'éthérique, tandis que l'éthérique tend à étouffer l'astral. Tout se passe donc comme si chaque être possédait en lui-même un double caractère, détruisant sans cesse ce qu'il édifie sans relâche. 

Ainsi, les rapports de l'éthérique et de l'astral observés dans la vie animale ou humaine apparaîtront à l'imagination sous la forme d'un être de nature contradictoire, qui enfante et détruit à la fois. Nous avons vu qu'Artémis fait mourir et fait naître, qu'elle est en même temps protectrice et chasseresse des animaux sauvages. Si Proserpine est une déesse de la végétation, Artémis est tout particulièrement associée à la vie animale.

L'image grandiose et un peu inquiétante de ces dieux complexes n'est pas seulement une explication ou le symbole mythique d'un fait que la physiologie moderne constate et étudie. Ce n'est pas seulement un mythe naturaliste. La destruction et la reconstruction continuelles du corps physique des êtres vivants, et tout particulièrement de notre propre corps, peut constituer une expérience religieuse très importante. Et c'est bien ainsi que l'ont considéré les Grecs et les Hindous.

Au cours des mystères d'Éleusis, on représentait le mythe de Proserpine. Les mystes devaient « contempler en silence », nous disent les textes, ce drame ou cette suite de tableaux vivants. En d'autres termes, ils méditaient sur les images qu'évoquaient les rites du mystère. Elles provoquaient en eux une expérience intérieure si profonde qu'au dire de ceux qui l'ont vécue, et dont les impressions nous ont été transmises, tout homme qui avait pris part aux mystères en sortait transformé; la vie avait changé d'aspect pour lui.

C'est en l'honneur d'Artémis, déesse de la mort et de la naissance, que se déroulaient les mystères d'Éphèse.

Quant au culte de Shiva et de Kali-Dourga, il a suscité, à côté de sectes aux rites étranges, sanglants ou obscènes, des écoles mystiques d'une haute valeur.


LE PERPÉTUEL RAJEUNISSEMENT

Cette même expérience de la destruction et de la reconstruction du corps peut être encore aujourd'hui, sous des formes naturellement fort différentes, un élément important du développement spirituel. Les légendes grecques, les constructions un peu monstrueuses ou amorales du plus sombre génie hindou ne peuvent plus nous servir. 

Mais, en approfondissant la notion qui servait de base à ces cultes, nous nous approchons d'un fait capital dans la vie de la nature, d'une de ses lois les plus générales. C'est la loi du rajeunissement, du renouvellement perpétuel de l'univers. Si les formes ne se détruisaient pas perpétuellement, elles ne sauraient se modifier, se métamorphoser. 

La vie s'éteindrait dans une sclérose universelle. Les formes détruites ne sont pas reconstruites d'une façon absolument identique. Chaque fois, une légère modification se produit. Les formes peuvent ainsi se modifier, s'adapter, se perfectionner. Aucun progrès, aucune évolution ne serait possible sans ce renouvellement perpétuel qu'on pourrait juger à première vue n'être qu'un inutile travail de Pénélope.

Notre vie spirituelle la plus profonde peut, elle aussi, être atteinte par cette expérience de la reconstruction du corps. Elle peut nous conduire, en effet, à une connaissance du moi. Nous l'examinerons sous cet aspect au cours de notre étude sur l'esprit qui vit dans l'homme.


NAISSANCE DE LA SENSIBILITÉ

En examinant la façon dont s'affrontent l'éthérique et l'astral, nous sommes amenés à faire encore une autre observation.

Lorsque l'opposition entre ces deux forces se produit sous forme d'antagonisme entre un corps éthérique et un corps astral, tous deux incarnés dans le même individu, il naît la sensibilité. C'est elle qui caractérise l'animal vis-à-vis de la plante.

Au contraire, lorsque les forces astrales agissent de l'extérieur, sans être organisées et individualisées en un corps astral, il n'y a pas de sensibilité. Le cas de certaines plantes qui réagissent à l'attouchement, comme les gobe-mouches ou les sensitives, est exceptionnel. Leur réaction ne manifeste pas, en réalité, une véritable sensibilité. Avec les plantes carnivores comme le gobe-mouches, nous nous trouvons d'ailleurs, semble-t-il, à l'extrême limite entre les deux règnes végétal et animal.


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Si nous confrontons nos observations et l'enseignement de la science spirituelle, nous sommes amenés à constater que tous les êtres vivants, plantes, animaux et hommes, possèdent, outre leur corps physique, un corps de vie ou corps éthérique. Au cours de leur cycle de développement, les plantes sont effleurées par un élément qui n'est pas normalement incarné chez les êtres du règne végétal : le corps astral. Il modifie le caractère de la plante, mais entraîne son dépérissement et sa mort.

Les animaux et les hommes possèdent des facultés qui manquent à la plante ; une sensibilité qui leur rend possible de ressentir la joie et la douleur ; des désirs dont la satisfaction fait naître le plaisir ; le mouvement qui leur permet de rechercher l'objet du désir et d'éviter la douleur. Le corps astral se manifeste par ces qualités comme le corps éthérique se manifeste par la vie.

Avec le corps éthérique nous voyons apparaître la vie, avec le corps astral la sensibilité et la conscience psychologique.


APPARITION DE LA CONSCIENCE MORALE

Chez l'homme un élément spirituel, le moi, s'ajoute au corps astral. Le moi et le corps astral sont liés entre eux comme l'éthérique l'est au physique. Le moi permet qu'à la conscience psychologique s'ajoutent la réflexion et la conscience morale. 

Par son moi, l'homme est capable d'inventer, de créer quelque chose d'original ou d'adapter ce qu'il sait à des circonstances nouvelles. L'animal n'invente pas. Il est par contre doué d'un instinct qui parfois égale ou même dépasse l'intelligence humaine, mais qui n'entre en action que pour des fins strictement déterminées : la satisfaction des besoins immédiats et la reproduction ou la conservation de l'espèce. 

Les gestes dictés par l'instinct sont indéfiniment répétés par l'espèce, sans aucun perfectionnement ni aucune originalité provenant des individus. Chaque espèce d'oiseau construit un nid différent, souvent conçu de façon fort ingénieuse, mais tous les oiseaux de la même espèce construisent des nids identiques. 

Des ruches fossiles vieilles de plusieurs centaines de milliers d'années sont identiques aux ruches d'abeilles modernes. Des castors enfermés dans un jardin zoologique construisent des huttes sur pilotis et les protègent par des digues, même dans le terrain le plus sec ; ils sont incapables d'adapter leur instinct aux circonstances. 

L'instinct agit au travers de l'animal qui exécute automatiquement ce qui lui est ainsi dicté; mais l'animal est incapable de réfléchir cette impulsion, de la retenir ou de la modifier. L'instinct peut être contenu ou transformé chez l'animal par une volonté extérieure, par le dressage, jamais par une impulsion venant de l'animal même.

L'homme est capable non seulement d'invention dans le domaine matériel, mais aussi d'invention morale ; il peut créer de nouveaux modes de penser et de sentir. Il est capable de se contraindre, de s'entraîner, de s'éduquer ou de se développer par sa propre volonté et pour des buts qu'il se pose à lui-même.

Si le corps éthérique fait naître la vie, le corps astral, la sensibilité et la conscience psychologique, le moi nous permet d'acquérir la conscience morale et la faculté d'invention.


LES DEUX GROUPES :
PHYSIQUE-ÉTHÉRIQUE,
ASTRAL-MOI

Examinons quelques-uns des rapports qui existent entre ces différents éléments : corps éthérique, corps astral et moi.

Les animaux et l'homme dorment. Pendant le sommeil, la sensibilité, les désirs et le mouvement disparaissent presque complètement. Par contre les processus purement vitaux persistent. Pendant le sommeil, le corps éthérique est donc toujours lié au corps physique, tandis que le corps astral en est libéré. L'action du moi disparaît également.

Ainsi, tandis que le corps éthérique reste étroitement lié au physique tant que dure la vie, le corps astral et le moi sont beaucoup moins stables. Les liens entre ces deux groupes varient sans cesse et se relâchent jusqu'à cesser complètement dans le sommeil profond, sous l'influence d'anesthésiques, pendant un évanouissement ou en état d'hypnose.

Nous venons de voir, à propos du flétrissement des plantes, que tandis que le corps éthérique construit sans cesse, tend à développer indéfiniment les êtres vivants, le corps astral au contraire détruit ce que l'éthérique a édifié. C'est pourquoi lorsque le corps astral est resté pendant un certain temps en liaison trop étroite avec les corps physique et éthérique, la fatigue apparaît. Elle se manifeste physiologiquement par la formation dans le sang et les humeurs de toxines qui sont des produits de désagrégation de l'organisme, la marque du travail de destruction du corps physique. Les sensations trop vives, le travail musculaire ou intellectuel, qui sont des manifestations de l'activité du corps astral, augmentent cette fatigue.

Pendant le sommeil, la disparition du corps astral, qui ramène l'homme et les animaux à l'état de plantes, permet au corps éthérique de reprendre toute son activité. Il répare les destructions produites par le corps astral. La fatigue disparaît.

Ainsi nous voyons, dans cette organisation complexe des animaux et de l'homme, se former deux pôles : d'une part le corps physique et le corps éthérique ; d'autre part le corps astral, auquel, chez l'homme, est étroitement uni le moi.  Au cours de toute la vie, le couple corps physique - corps éthérique reste indissolublement uni, sauf dans des cas exceptionnels et pendant un temps très court comme lorsqu'un homme est en état de mort apparente. Par contre le couple corps astral-moi, lui aussi étroitement uni, se sépare à intervalles rythmiques du précédent.

Pour qu'apparaissent la sensibilité et la conscience, il faut que les deux couples soient unis. Elles disparaissent si cette union se relâche ou cesse.


***

D'autres observations vont nous montrer plus clairement encore la polarité entre ces deux couples.

Dans le corps physique, le corps éthérique agit plus particulièrement au moyen des systèmes lymphatique et glandulaire ; il se manifeste nettement dans l'activité des glandes à sécrétion interne qui jouent un rôle prépondérant dans la croissance. Il est l'agent de la circulation des liquides dans tout le corps. 

Le corps astral par contre s'exprime par les systèmes sensoriel et nerveux. Il agit aussi d'une façon prépondérante dans la digestion, car pour parvenir à assimiler les substances ingérées, il faut qu'elles soient d'abord détruites. Le degré d'importance et de complexité du système nerveux, qui varie avec chaque espèce animale, montre l'importance que joue le corps astral dans chacune d'elles. 

Plus le système nerveux est développé, plus le degré de conscience psychologique de l'animal s'élève. L'activité du corps astral s'exprime ainsi sous son double aspect : physiologique dans le système nerveux et psychologique dans la conscience. L'importance du corps éthérique varie inversement ; moins le corps astral est développé, plus son antagoniste, le corps éthérique, a de force. 

En conséquence la régénération du corps physique se fait d' autant plus facilement et rapidement que le corps astral est plus faible et, partant, que le système nerveux est moins développé. Si l'on coupe en deux un ver de terre ou une hydre d'eau douce, chaque tronçon reforme un animal complet. L'écrevisse ou le lézard n'en seraient pas capables ; mais si l'on coupe la patte d'une écrevisse ou la queue d'un lézard, elles repoussent. 

Les animaux supérieurs à système nerveux très développé et l'homme sont incapables de régénérer tout un membre ; ils ne peuvent que cicatriser leurs plaies et ressouder les os brisés. Le pouvoir de régénération de l'organisme est en proportion inverse du développement du système nerveux, et par conséquent du degré de conscience psychologique atteint par l'espèce à laquelle appartient l'être blessé.

La conscience psychologique naît, en effet, de cet antagonisme entre le corps astral et les corps physique et éthérique. Plus l'activité du corps astral grandit et limite les corps physique et éthérique, plus la conscience s'affirme. 

Cet accroissement de conscience a nécessairement pour contrepartie une diminution de la vitalité. Si le corps éthérique prédomine d'une façon excessive chez un être humain, les facultés de l'émotivité, du sentiment, de la volonté et de la pensée sont atrophiées chez lui ; on dit qu'il est «  grand, gros, fort ... et bête ».

La prédominance de l'astral chez un être humain a pour conséquence le développement de l'émotivité, de la sensibilité, des désirs, des passions. Cet excès d'astralité nuit à l'éthérique, donc à la vitalité. Par une image très juste, on dit que cet homme « est rongé de passions ».

L'action très forte du moi, lorsqu'elle se produit par un affinement des sentiments et de la pensée, ce qui est normalement le cas, rend aussi souvent les êtres plus fragiles. Les sentiments et la pensée naissent sous l'action du moi, mais au sein du corps astral. 

Ce sont des facultés astrales spiritualisées. L'action directe du moi n'aurait pas cet effet destructeur qui est une caractéristique de l'astral. Dans l'état actuel du développement humain, tout renforcement de la conscience a pour contrepartie un affaiblissement de la vitalité.

Ainsi, d'après l'enseignement de la science spirituelle, lorsqu'à des éléments empruntés au monde physique se joint un corps éthérique (c'est le cas dans une graine, dans un ovule dès la conception), un organisme peut se former, la vie apparaît.  Si un corps astral vient s'ajouter au corps éthérique, la sensibilité, le mouvement, la conscience psychologique apparaissent. Si un moi vient couronner les trois corps, la conscience morale, la réflexion, la faculté d'invention vont naître.

Après avoir étudié l'éthérique, notre seconde étape sur le chemin que nous suivons doit nous amener à aborder l'astral. Nous rechercherons tout d'abord quelle méthode nous pouvons employer pour pénétrer dans ce nouveau domaine par les seules forces de nos facultés normales.



[1] Il y a également un moment d’astralisation chez les plantes cryptogames.  Il est particulièrement net dans certaines phases du processus de reproduction de quelques algues.

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